En déclenchant l’article 49.3 de la Constitution, le gouvernement d’Elisabeth Borne a déclenché un ouragan d’indignation : les députés d’Outre-mer et en particulier ceux du groupe Liberté indépendants Outre-mer et territoires (Liot) se disent prêts à faire chuter le gouvernement.
« Lundi, le gouvernement pourrait bien tomber et même si ce n’est pas certain, nous ferons tout pour qu’il tombe ! » Assénée avec un ton déterminé et un sourire ironique, la formule est d’Olivier Serva, député (Liot) de Guadeloupe. L’élu, ancien président de la délégation aux Outre-mer de l’Assemblée nationale, faisait partie de la majorité présidentielle lors de la précédente législature. Cette fois, il se dit excédé par les passages en force du gouvernement et déposera avec ses collègues du groupe Liberté indépendant Outre-mer et territoires une motion de censure visant à renverser le gouvernement d’Elisabeth Borne. La Première ministre a scandalisé sur – presque – tous les bancs de l’hémicycle de l’Assemblée nationale en déclenchant l’article 49.3 de la Constitution, qui permet de faire adopter un texte sans vote, à propos de son projet de loi de réforme des retraites. Le texte vise à repousser l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. En « engageant la responsabilité du gouvernement », c’est la formule consacrée, Elisabeth Borne s’expose au dépôt de motions de censures de la part des groupes politiques : si l’Assemblée adopte l’une d’entre elles, elle devra démissionner avec tous ses ministres. Au Palais-Bourbon, et dans tout le quartier de l’Assemblée nationale, au cœur de Paris, l’émotion a été vive jeudi après-midi. Dans l’hémicycle de puissantes huées et des quolibets sont partis des bancs de l’opposition et dans la rue des manifestations improvisées ont placé dans un face-à-face tendu des centaines de manifestants et de policiers.
Motion de censure Outre-mer
Au beau milieu de ce climat troublé, les députés ultramarins du groupe Liot se retrouvent dans la position de potentiel tombeur du gouvernement : seule leur motion de censure est susceptible d’être voté par tous les groupes d’opposition. Il ne fait pas partie du groupe Liot mais le député (GDR) de Guadeloupe Christian Baptiste, confirme cette analyse.
« Prêts à faire chuter le gouvernement »
Selon lui, « le gouvernement a profondément méprisé les députés dits d’Outre-mer tout au long de cette discussion sur la réforme des retraites et voilà que nous sommes au centre du jeu ! Aujourd’hui, on se rend compte que le centre c’est nous ! Il y a eu un manque de considération pour l’ensemble de la représentation nationale. Alors que toutes les voix comptaient ! » Il votera la motion de censure proposée par le groupe Liot. Si elle est adoptée, cela n’a jamais été le cas dans la cinquième république, la logique voudrait que le président de la République annonce la dissolution de l’Assemblée nationale. Pour les députés ultramarins à qui France-Antilles a pu poser la question, « ce n’est pas un risque » : tous se disent prêts à affronter de nouvelles élections législatives. Il convient toutefois de noter que la chute du gouvernement et la dissolution de l’Assemblée nationale ne font pas partie des hypothèses les plus probables. Lundi, au moment des votes des motions de censure, les députés d’opposition se trouveront exactement dans la même position qu’Elisabeth Borne ce jeudi : il auront besoin des votes des députés Les Républicains (LR). Eric Ciotti, le président du parti Les Républicains a déjà annoncé que les députés de son camp ne voteraient « aucune motion de censure ». Pas de quoi décourager Olivier Serva qui affirme que « si Éric Ciotti était sûr du vote de ses troupes, Elisabeth Borne n’aurait pas déclenché le 49.3 ». Il lui faudra convaincre au moins 27 députés LR pour parvenir à faire tomber le gouvernement. Lui qui faisait partie de la majorité présidentielle et respectait les consignes de votes du groupe Lrem il y a moins de deux ans.