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16 December 2024
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Allié historique de la macronie, François Bayrou nommé Premier ministre

Neuf jours après la motion de censure déposée par le NFP qui a renversé le gouvernement Barnier, ce vendredi 13 décembre Emmanuel Macron a nommé comme chef du gouvernement le centriste François Bayrou, son allié de la première heure. Le tout nouveau Premier ministre aura pour mission de définir un budget pour 2025 et de mettre fin à l’instabilité politique régnant depuis la dissolution de l’Assemblée en juin dernier en se maintenant plus longtemps que l’éphémère Michel Barnier. 

L’Elysée a clos le suspense ce vendredi matin. Plus d’une semaine après la motion de censure votée par le NFP et le RN qui a renversé le gouvernement Barnier, Emmanuel Macron a fini par nommer François Bayrou Premier ministre ce 13 décembre.

Dans un communiqué de l’Élysée, le président du parti centriste MoDem, allié du chef de l’Etat depuis 2017, a été « chargé de former un gouvernement« . Cette décision intervient au terme de nombreuses consultations pour trouver un accord ouvrant la voie à un nouveau gouvernement capable de se maintenir plus longtemps que celui de l’éphémère Michel Barnier, évincé par les députés à peine trois mois après sa nomination.

Suite à la censure intervenue mercredi 4 décembre, Emmanuel Macron était pressé par son propre camp de nommer rapidement un successeur à l’ancien commissaire européen issu des rangs de la droite classique. Le chef de l’Etat a consulté son camp et les chefs des principaux partis – hormis ceux de La France Insoumise, ayant refusé l’invitation, et ceux du Rassemblement national, non conviés – mardi, lors d’une rencontre collégiale inédite à l’Élysée depuis le début de la crise politique déclenchée par la dissolution de l’Assemblée nationale décidée en juin dernier par Emmanuel Macron.

La fumée blanche était attendue jeudi, le chef de l’Etat ayant écourté une visite éclair en Pologne pour rentrer plus tôt à Paris, avant d’annoncer finalement que la nomination d’un nouveau chef de gouvernement n’interviendrait que vendredi. Ce fut chose faite ce 13 décembre à l’issue d’un entretien d’1h45 entre Emmanuel Macron et François Bayrou, qui aura la délicate mission d’élargir le socle sur lequel s’était appuyé Michel Barnier.

Le Béarnais devient le quatrième chef de gouvernement depuis la réélection d’Emmanuel Macron en avril 2022, succédant à Elisabeth Borne, Gabriel Attal et Michel Barnier.

Équation politique compliquée

Ce choix de François Bayrou, allié de longue date d’Emmanuel Macron, ne symbolise en aucun cas une rupture avec la politique macroniste menée depuis 2017. Le centriste incarne plutôt la continuité. Ce que critique la gauche, notamment le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, opposé à la nomination d’un Premier ministre issu des rangs macronistes. « Ce que nous demandons et ce que les Français veulent, c’est une rupture avec la politique qui a été menée jusqu’ici » déclarait-il mercredi 11 décembre.

Dans la foulée de la nomination de François Bayrou à Matignon, la cheffe de file des députés insoumis, Mathilde Panot, a annoncé que son parti va déposer une motion de censure contre le nouveau Premier ministre. Dans un message posté sur X, la présidente du groupe « insoumis » à l’Assemblée nationale dénonce le choix d’Emmanuel Macron. « Deux choix clairs s’offrent au pays : la continuité des politiques de malheur avec François Bayrou ou la rupture. Deux choix s’offriront aux députés : le soutien au sauvetage de Macron ou la censure. Nous avons fait le nôtre. »

La gauche, qui réclame sa part du pouvoir depuis les législatives anticipées de juin remportées par l’alliance du Nouveau Front Populaire (NFP), avance dispersée. Deux lignes s’affrontent depuis la chute de Michel Barnier. D’un côté, socialistes, écologistes et communistes qui ont appelé, à des degrés divers, à la discussion, acceptant de participer aux consultations du chef de l’Etat et d’engager un dialogue en vue notamment « d’obtenir un accord de non-censure » dixit le leader communiste Fabien Roussel. De l’autre, La France insoumise qui brandit la menace de l’explosion du NFP, appelant ses partenaires à « ne pas céder aux sirènes d’un gouvernement d’union nationale ». « Pas d’accord de coalition! Pas de +non-censure+. Revenez à la raison et à la maison! » a lancé Jean-Luc Mélanchon mardi soir.

À voir quelle sera l’attitude du Parti socialiste à l’Assemblée nationale, alors que le camp présidentiel a affiché ces derniers jours la volonté de former une coalition de non-censure en additionnant les députés du « socle commun » (Renaissance, LR, MoDem, Horizons), de Liot et du Parti socialiste pour obtenir une majorité au Palais Bourbon. Une telle coalition permettrait d’offrir à François Bayrou, avec 299 députés, une majorité absolue à l’Assemblée nationale, le seuil étant fixé à 289 parlementaires. Mais c’est loin d’être gagné. En réaction à la nomination de François Bayrou, les cadres du PS se sont exprimés dans une lettre ouverte en critiquant le choix d’Emmanuel Macron qui prend « la responsabilité d’aggraver la crise politique et démocratique dans laquelle il a placé le pays » et qui « fait le choix de continuité et de la préservation de son bilan. »

Mais à droite, l’idée d’une coalition ou même d’un pacte de non-agression vis-à-vis de la gauche dérange. Les Républicains, alliés du camp présidentiel au sein du « socle commun », ont campé sur leurs lignes rouges cette semaine : « ni LFI au gouvernement, ni le programme du Nouveau Front Populaire« , a répété au micro de Franceinfo, mardi, le chef de file des LR à l’Assemblée, Laurent Wauquiez.

L’équation politique n’est donc pas simple pour le chef de l’Etat, signe de la difficulté à trouver une personnalité susceptible de se maintenir plus longtemps que l’éphémère Michel Barnier et de faire adopter un budget, dans un paysage politique fracturé. D’après l’AFP, le président aurait souligné mardi devant les partis « sa volonté de ne pas dissoudre » à nouveau l’Assemblée nationale d’ici à la fin de son mandat en 2027. Et il a relevé « une unanimité des forces politiques pour ne plus dépendre du Rassemblement national« , qui dispose du plus grand groupe à l’Assemblée avec 124 élu(e)s.

Le RN, faiseur de gouvernements depuis la dissolution de juin dernier, a d’ailleurs annoncé peu de temps après l’annonce de la nomination de François Bayrou à Matignon, par la voix de son président Jordan Bardella, qu’il « n’y aurait pas de censure a priori » à l’encontre du nouveau chef du gouvernement. Avant d’alerter sur le fait que « nos lignes rouges demeurent, elles ne vont pas varier. Pas de déremboursement des médicaments, ne pas fragiliser la situation économique et sociale des retraités. » Même son de cloche chez Eric Ciotti, l’ancien président des LR qui s’est rallié au RN après la dissolution de l’Assemblée nationale et qui conduit un groupe de 16 députés au Palais Bourbon.

Épée de Damoclès

C’est notamment en s’appuyant sur ces points du programme du Rassemblement national que les députés d’extrême droite ont justifié leur vote de la motion de censure portée par la gauche. L’enjeu pour le nouveau locataire de Matignon sera donc désormais de construire une majorité relative stable à l’Assemblée nationale afin d’établir un budget pour 2025, une priorité érigée par le chef de l’Etat, et de faire adopter des projets de loi. En évitant l’écueil d’une nouvelle censure qui plongerait davantage le pays dans la crise politique.

Charge à François Bayrou de dialoguer avec l’ensemble des partis, hors Rassemblement national et La France insoumise. Le nouveau Premier ministre pourra s’appuyer sur son parti (MoDem) et ses alliés macronistes d’Horizons et de Renaissance. Mais l’incertitude demeure sur le positionnement des élus de La Droite républicaine de Laurent Wauquiez ou des groupes de gauche – socialiste, écologiste et communiste – qui ont participé aux discussions avec Emmanuel Macron mais qui exigeaient un chef du gouvernement issu de leurs rangs.

Âgé de 73 ans et doté d’une solide expérience en politique, François Bayrou n’a néanmoins jamais occupé la fonction de chef de gouvernement. Décrit comme un très proche d’Emmanuel Macron qu’il a soutenu dès sa campagne de 2017, l’ancien triple candidat à l’élection présidentielle sous l’étiquette UDF devenue MoDem en 2007 était depuis 2020 Haut-commissaire au Plan. Lors de l’élection présidentielle de 2022, François Bayrou avait parrainé Marine Le Pen par « choix démocratique ».

Le Béarnais, maire de Pau depuis plus de dix ans, a débuté sa carrière politique au centre en 1982 en tant que conseiller général puis il a été député des Pyrénées-Atlantiques durant 19 ans. Il a occupé les fonctions de président du Conseil général des Pyrénées-Atlantiques de 1992 à 2001 et a été ministre de l’Éducation nationale de 1993 à 1997 dans les gouvernements Balladur puis Juppé. François Bayrou a également été député européen de 1999 à 2002. 

Il a aussi été un très éphémère ministre de la Justice dans le premier gouvernement d’Edouard Philippe en 2017. François Bayrou était resté en poste pendant à peine un mois avant qu’une affaire judiciaire ne le contraigne à la démission. Il avait en effet été mis en examen dans l’affaire dite des assistants parlementaires européens du Modem. Le président fondateur du parti centriste a été relaxé le 5 février dernier par le tribunal correctionnel de Paris dans cette affaire où il était poursuivi avec dix autres membres du MoDem pour des détournements de fonds publics. François Bayrou était accusé d’avoir utilisé des fonds européens pour rémunérer des assistants parlementaires qui travaillaient, en réalité, pour les partis centristes en France. Mais le parquet, qui avait requis 30 mois de prison avec sursis et 70 000 euros d’amende contre le leader centriste, a fait appel de cette relaxe. Une épée de Damoclès qui pèse toujours sur la tête du nouveau Premier ministre.

Photo de Une : François Bayrou, 73 ans, succède à Michel Barnier à la tête du gouvernement © Haut-commissariat au Plan