Ce lundi à l’Assemblée nationale, Michel Barnier a dégainé l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire adopter sans vote le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2025. Le Premier ministre, engageant la responsabilité de son gouvernement, a en retour vu le Nouveau Front Populaire et le Rassemblement national déposer chacun une motion de censure. Leur examen se fera mercredi 4 décembre au soir ou jeudi 5 au matin. En cas de vote favorable, le gouvernement Barnier, qui ne dispose pas de la majorité à l’Assemblée, sera renversé et devra démissionner.
49.3, 2, 1 partez… Comme attendu, le Premier ministre Michel Barnier a invoqué ce lundi l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire adopter sans vote des députés(e)s le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2025.
« Le texte est là. C’est un moment de vérité qui met chacun devant ses responsabilités. Aux élus de voter un texte responsable et indispensable pour les Français ou alors d’entrer en territoire inconnu » a déclaré le Premier ministre depuis le perchoir de l’Assemblée nationale, avant d’annoncer le recours au 49.3 sous les brouhahas des parlementaires et le départ de l’Hémicycle des élus de gauche.
Le 49.3 a immédiatement suspendu les débats sur le texte dont l’ultime version avait été concoctée par une commission mixte paritaire après les débats à l’Assemblée et au Sénat. Avec ce 49.3, le budget de la Sécurité sociale serait adopté sauf si une ou plusieurs motions de censure étaient déposées.
Il n’a pas fallu longtemps pour que les oppositions au « socle commun » sanctionnent ce passage en force du Premier ministre. Quelques heures à peine après l’annonce du 49.3 – les groupes ont 24h pour le faire -, deux motions de censure ont été déposées par la gauche et l’extrême droite.
La date et la modalité de leur discussion seront définies par la conférence des présidents de groupes. Généralement, 48h s’écoulent entre le dépôt d’une motion de censure et son débat / vote. Le verdict pour le gouvernement Barnier, qui ne dispose pas de majorité au Palais Bourbon, devrait donc intervenir mercredi ou jeudi au plus tard.
Risque réel de renversement du gouvernement
La motion des quatre partis du Nouveau Front populaire (écologistes, socialistes, insoumis et communistes), signée par 185 députés, sera étudiée en premier par les députés(e)s, avant celle de l’extrême droite, déposée par le Rassemblement national et ses alliés du groupe « Union des droites » emmené par Eric Ciotti.
La gauche a justifié cette censure dans un communiqué commun par « l’absence de dialogue, le mépris pour les propositions formulées et pour le travail parlementaire« . Pour l’extrême droite, le PLFSS « ne répond en rien aux enjeux de notre pays » notamment en raison de « la désindexation des retraites » par rapport à l’inflation et de « la hausse du coût du travail ».
En cas de vote favorable d’une de ces motions, le gouvernement Barnier sera renversé et contraint de démissionner. Car en recourant au 49.3, le Premier ministre engage par la même occasion la responsabilité de son gouvernement sur l’ensemble du texte du PLFSS. Un scénario crédible au vu des annonces du Rassemblement national qui a attesté qu’il voterait la motion de la gauche.
Pour rappel, le parti de Marine Le Pen et Jordan Bardella dispose, depuis les Législatives anticipées de juin, du plus grand groupe parlementaire à l’Assemblée nationale, avec 124 député(e)s.
Ces derniers jours, le parti d’extrême droite a usé de cette position de force à l’Assemblée pour négocier avec Michel Barnier des éléments du PLFSS, voire au-delà du simple budget de la Sécurité sociale.
Sous la pression, le gouvernement a concédé au RN une baisse du budget de l’aide médicale d’Etat (AME), une augmentation des taxes sur les transactions financières et l’ouverture d’un débat sur l’instauration du scrutin proportionnel aux élections législatives. Il s’est aussi engagé « à ce qu’il n’y ait pas de déremboursement des médicaments en 2025 en application du PLFSS », mais a refusé de revenir sur la désindexation des retraites vis-à-vis de l’inflation.
Cette pression n’était plus supportable pour le Premier ministre qui a donc opté ce lundi pour le 49.3. « Chacun doit prendre ses responsabilités et je prends les miennes » a-t-il assumé.
Sauf surprise, le gouvernement Barnier devrait tomber dans les prochains jours. En cas de censure du gouvernement, Emmanuel Macron devra nommer un nouveau Premier ministre.
Photo de Une : le Premier ministre Michel Barnier au Palais Bourbon ce lundi 2 décembre © Capture d’écran Assemblée nationale