« Le carnaval n’a pas toujours eu le même effet cathartique selon les périodes »
INTERVIEW. Raymond Otto nous livre son analyse éclairée sur l'évolution du carnaval, de ses origines cathartiques à sa transformation en un événement tentaculaire. Entre anxiétés modernes, massification, engagement politique et rôle identitaire, il décrypte les mutations sociales qui ont façonné cette tradition.
Le carnaval en Guadeloupe joue-t-il toujours
un rôle de catharsis dans la société actuelle ?
Oui et non, le carnaval conserve un aspect
cathartique, mais pas pour les mêmes raisons que dans les années
1980. Aujourd'hui, notre société produit énormément d'anxiété, et
le carnaval est devenu bien plus qu'un espace cathartique. C'est
désormais un exutoire, un lieu où les phénomènes d'inversion sont
présents, mais rarement dans un but de bien-être. Officiellement,
on n'en parle pas, mais le carnaval est de plus en plus marqué par
des tensions, des agressions, et des règlements de compte, que ce
soit pendant, avant ou après les festivités.
A-t-il toujours eu ce rôle dans la société
guadeloupéenne ?
Son effet cathartique a évolué au fil du
temps, et on peut diviser cette évolution en trois grandes
périodes. Initialement, le carnaval permettait aux esclaves
d'imiter leurs maîtres dans une sorte de transgression autorisée.
C'était un moment d'inversion sociale. Ensuite, jusqu'aux années
1980,...