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Les indépendantistes ultramarins actent la création d’un Front international de décolonisation | Guyaweb, site d’information et d’investigation en Guyane

27 January 2025
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Les indépendantistes ultramarins actent la création d’un Front international de décolonisation

Douze mouvements politiques indépendantistes d’Outre-mer ont acté vendredi 24 janvier à Nouméa la création d’un Front international de décolonisation. Cette organisation compte réinscrire la Guyane sur la liste de l’ONU des pays à décoloniser. Bien qu’absente du congrès fondateur, l’ombre de l’Azerbaïdjan plane sur cette nouvelle instance dans un contexte de tensions entre Paris et Bakou, accusé par la France d’ingérence dans ses territoires ultramarins.

Des représentants de mouvements indépendantistes de plusieurs territoires d’Outre-mer et de Corse se sont réunis jeudi 23 et vendredi 24 janvier en Nouvelle-Calédonie pour le congrès constitutif du « Front international de décolonisation » (FID). Initialement esquissée l’été dernier par le Groupe d’initiative de Bakou, cette organisation réunit douze mouvements indépendantistes ultramarins*, parmi lesquels le Mouvement de décolonisation et d’émancipation sociale (MDES) du député guyanais Jean-Victor Castor.

Ce Front international de décolonisation vise à conduire les « nations » concernées à la « pleine souveraineté », selon la charte constitutive de l’organisation relayée dimanche par l’AFP. Les signataires souhaitent notamment « obtenir le statut de membre observateur du Mouvement des non-alignés« , ainsi que l’inscription de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Corse « sur la liste des pays à décoloniser de l’ONU« . Liste dont faisait partie la Guyane jusqu’à la départementalisation en 1946.

À noter que la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie sont déjà inscrites sur cette liste des pays à décoloniser,  depuis 1986 et 2013 respectivement, ce qui permet aux mouvements indépendantistes de ces territoires de dialoguer avec l’ONU. C’est ainsi que des membres du MDES, invités par des Kanak, ont pu s’exprimer en 2023 au siège new-yorkais des Nations Unies lors d’une table-ronde sur la décolonisation des territoires sous tutelle française, pour porter le plaidoyer d’une Guyane indépendante.

Ingérence étrangère

Cette table-ronde avait été organisée par le Groupe d’initiative de Bakou (GIB), une ONG internationale selon ses statuts, créée en Azerbaïdjan en juillet 2023 pour soutenir « les mouvements anti-coloniaux ». Le GIB, qui ne ménage pas ses efforts pour favoriser les rencontres entre les représentants de formations indépendantistes ultramarines, est considéré par Paris comme une « officine de propagande d’Etat contre la France » qui mène une politique la ciblant via les Outre-mer.

Les relations entre les deux Etats sont tendues depuis la reprise, en 2020 puis 2023, du conflit armé opposant l’Arménie – soutenue par la France – et l’Azerbaïdjan. Dans ce contexte, Bakou est accusé par Paris d’ingérence dans ses territoires ultramarins où le régime du dictateur Ilham Aliyev soutiendrait les mouvements indépendantistes, comme le FLNKS lors des troubles politiques qui ont secoué la Nouvelle-Calédonie en 2024.

Le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, s’est d’ailleurs exprimé ce week-end dans Ouest-France pour affirmer, à propos du Front international de décolonisation, que l’Azerbaïdjan « met en œuvre des opérations d’ingérence et de déstabilisation ». « Ce régime, à visage découvert et sans le moindre scrupule, s’attaque à notre intégrité et à nos principes fondamentaux. C’est inacceptable » a dénoncé Manuel Valls. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a quant à lui appelé à ce que ces « tentatives vaines menées par l’Azerbaïdjan » cessent « immédiatement ». 

La réponse de Bakou n’a pas traîné. Elle figure en page d’accueil des réseaux sociaux du GIB qui « réfute résolument ces allégations et les dénonce. (…) Le GIB en tant qu’ONG internationale qui lutte contre le colonialisme selon son mandat a proclamé le procès de la colonisation comme son but principal et continue ses activités légitimes dans ce sens » a déclaré Abbas Abbasov, le directeur exécutif du Groupe d’initiative de Bakou, dont sont membres des indépendantistes de Martinique, de Guyane (MDES), de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française.

Photo de Une : le drapeau azerbaïdjanais flottait aux côtés de ceux de la Guyane et de la Kanaky lors du congrès constitutif du Front international de décolonisation (FID) organisé les 23 et 24 janvier à Nouméa © Facebook Groupe Initiative Bakou

*Dans le FID figurent notamment le FLKNS de Kanaky / Nouvelle-Calédonie, l’Union pour la libération de la Guadeloupe (UPLG), le Mouvement de décolonisation et d’émancipation sociale (MDES) de Guyane, le Parti pour la libération de la Martinique (Palima), le Tavini Huiraatira de Polynésie et Nazione de Corse. Hors outre-mer français, la charte du FID a été signée par des représentants de deux territoires néerlandais, Bonaire et la partie sud de l’île de Saint-Martin (Sint Maarten).

Pour aller plus loin, relire cet article consacré à la stratégie internationale du MDES pour l’indépendance de la Guyane. DE BAKOU À NEW YORK, LA STRATÉGIE DU MDES POUR FAIRE EXISTER LE « PÉYI GWIYANN »