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Rapport sur la pauvreté de nos ainés : un constat alarmant

04 October 2024
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L'association Petits Frères des Pauvres, qui lutte contre la pauvreté et l'isolement des personnes âgées, a publié son rapport annuel et national sur les chiffres de la pauvreté, avec une étude quantitative qui intègre la Martinique et la Guadeloupe pour la première fois. Des chiffres préoccupants en ressortent, mettant en lumière la croissance de la précarité chez nos ainés. 

Le rapport des Petits Frères des Pauvres, publié le 30 septembre et intitulé Vivre sous le seuil de pauvreté quand on a 60 ans et plus, est sans équivoque : la pauvreté chez les aînés ne diminue pas et nos territoires sont particulièrement touchés par ce phénomène préoccupant. Muriel Ventadour, responsable de l'antenne de l'association en Martinique, revient sur certaines données du rapport et dresse un état des lieux de la pauvreté des aînés en Martinique.

Des revenus qui ne suivent pas

"La pauvreté en Martinique est présente partout, que ça soit dans les zones rurales, les centres urbains ou les régions plus proches des activités économiques", observe Muriel Ventadour. En effet, sur notre territoire, environ 45 000 ménages martiniquais vivent sous le seuil de pauvreté, soit 27 % de la population régionale. Ce taux est presque deux fois supérieur à celui de la France métropolitaine ( selon un rapport de l'INSEE en 2023).

Cepandant, alors que les ainés représentent une part croissante de la population et nécessitent souvent un accompagnement et des soins spécifiques : "les personnes âgées sont les plus touchées par la précarité. Les retraités sont majoritaires parmi les ménages pauvres, en particulier dans le nord de l'île, où les conditions de vie sont plus modestes. Près de quatre ménages pauvres sur dix sont des retraités, souvent des personnes seules" (rapport INSEE 2023).

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"17 % des personnes âgées précaires avouent s'être déja privées de nourriture, par manque de moyen "

Petits Frères des Pauvres a mené une étude quantitative nationale, incluant pour la première fois des données pour la Martinique et la Guadeloupe. Elle cible les personnes de plus de 60 ans, dont les revenus sont égaux ou inférieurs au seuil de pauvreté, soit 1158 euros par mois pour une personne seule. L'étude comprend au moins 50 répondants par département, avec 3 % de participants provenant de la Martinique et de la Guadeloupe.

L'enquête révèle que 69 % des personnes âgées pauvres ont connu des privations au cours des douze derniers mois, et parmi elles, 17 % se sont privées de nourriture ;14% ne sont pas allées consulter d'aide médical faute de pouvoir payer. D'ailleurs, une personne âgée sur dix indique ne pas avoir de complémentaire santé, dont 10 pour cent en Martinique et 15 pour cent en Guadeloupe. 31 % déclarent avoir du mal à payer leurs factures quotidiennes et environ 55 % des personnes de 60 ans (et plus) estiment que leurs conditions de vie se sont dégradées ces dernières années, dont 59 % vivant avec moins de 750 euros par mois. Enfin, 73 % d'entre elles rencontrent des difficultés face à la dématérialisation des démarches administratives.

Ces résultats de l'étude sur les privations et les difficultés économiques soulèvent les défis auxquels font face les séniors de façon globale, et dons nos territoires ultramarins ; elle reflète également une réalité plus large : la disparité entre les revenus et les coûts de la vie. Ils ne suffisent pas à couvrir les besoins fondamentaux des ménages des ainés les plus précaires. "On estime le nombre de personnes pauvres de 60 ans et plus à environ deux millions dont 1,5 million pour les 65 ans et plus".

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"Les personnes que nous rencontrons vivent parfois avec 400 euros par mois"

Muriel Ventadour précise : "Plus de 50 % des personnes que nous accompagnons ont plus de 75 ans. Elles perçoivent de très faibles retraites, sans allocations complémentaires, et vivent parfois avec seulement 400 euros par mois." Une situation alarmante appuyée par le rapport des Petits Frères des Pauvres,  qui indique que le taux de pauvreté pour les personnes de 65 à 74 ans en Martinique est de 22,4 %, et grimpe à 29,3 % pour les 75 ans et plus.

L'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), versé aux retraités les plus précaires, concernerait 16 % des personnes de 62 ans et plus dans les territoires ultramarins. Cependant, la responsable souligne que cette aide n'est pas toujours solliciter, par manque de moyen : "Pour bénéficier du minimum vieillesse, il faut monter un dossier, et cela peut prendre du temps. Il y a des délais d'attente, et beaucoup de personnes n'ont pas les ressources pour constituer ce dossier, souvent par manque d'information ou d'accès au numérique. Elles finissent par abandonner." 

Par ailleurs, l'association préconise plusieurs points majeures pour palier à la pauvreté des personnes agées dont la revalorisation sans délai du minimum vieillesse au niveau du seuil de pauvreté, en tenant conte de l'inflation : l'appauvrissement des personnes âgées ne bénéficiant que de faibles revenus est une réalité: le minimum vieillesse, qui est, depuis sa création en 1956, le principal outil de lutte contre la pauvreté des personnes âgées, ne les protège plus et les maintient toujours sous le seuil de pauvreté". 

 

 

Un territoire vieillissant et ses problématiques

Pour rappel, le rapport de l'INSEE de 2020, intitulé La Martinique face au vieillissement de la population : hausse importante du nombre de seniors dépendants à l'horizon 2030, soulignait la préoccupation liée au vieillissement de notre territoire. En 2030, la population de seniors devrait être deux fois plus élevée que celle des jeunes de moins de 20 ans. L'INSEE estimait alors que les femmes agées en situation de dépendance resteraient majoritaires.