

Il y a 177 ans jour pour jour, le gouverneur Jean-François Layrle proclamait l'abolition de l'esclavage en Guadeloupe, libérant ainsi 87 000 personnes du joug colonial. Cette date historique, commémorée chaque année, rappelle à la fois la cruauté du système esclavagiste et l'héroïsme de ceux qui lui résistèrent.
Entre le XVIe et le XIXe siècle, la Guadeloupe fut le théâtre d'un des chapitres les plus sombres de l'histoire humaine. Les plantations de canne à sucre, moteur de l'économie coloniale, fonctionnaient grâce au labeur forcé de centaines de milliers d'Africains arrachés à leur terre natale.
"Entassés comme du bétail dans les cales des négriers, beaucoup choisissaient de se jeter à la mer plutôt que de subir leur destin", rappelle l'historienne Marie-Hélène Léotin. Sur les habitations, les châtiments corporels, les viols et les conditions de vie inhumaines étaient monnaie courante.
La flamme de la résistance : Delgrès, Ignace et les marrons
Dès les premières heures de l'esclavage, la résistance s'organisa. Les "marrons", esclaves en fuite, formèrent des communautés rebelles dans les mornes. Mais c'est en 1802 que la révolte atteignit son paroxysme. Face au rétablissement de l'esclavage par Napoléon, Louis Delgrès lança un appel historique : "Vivre libre ou mourir". Le 28 mai 1802, lui et 300 combattants préférèrent se faire sauter plutôt que de se rendre à Matouba. Quelques jours plus tôt, Joseph Ignace et ses hommes tombaient sous les balles à Baimbridge.
1848 : L'abolition dans la tourmente
La nouvelle de l'insurrection martiniquaise du 22 mai 1848 accéléra les événements. Le gouverneur Layrle, craignant une révolte générale, devança le décret de Paris en proclamant l'abolition le 27 mai. "Ce ne fut pas un cadeau de la métropole, mais une victoire arrachée par des générations de résistants", soulignait le professeur Jacques Adélaïde-Merlande. Parmi ces figures héroïques, la Mulâtresse Solitude, exécutée après avoir combattu enceinte, symbolise le courage des femmes esclaves.
Mémoire vivante : le legs contemporain
Aujourd'hui, le Mémorial ACTe à Pointe-à-Pitre perpétue cette mémoire douloureuse mais essentielle. Son architecture audacieuse, évoquant les racines d'un arbre de liberté, abrite un parcours sensoriel unique à travers l'histoire de l'esclavage.
La controverse récente autour des statues de Victor Schœlcher rappelle que cette mémoire reste vive. Comme l'écrivait Aimé Césaire : "Évoquer Schœlcher, ce n'est pas invoquer un vain fantôme. C'est rappeler à sa vraie fonction un homme dont chaque mot est encore une balle explosive."
Alors que résonnent les tambours du "kout tanbou" traditionnel, la Guadeloupe se souvient. De la douleur de l'arrachement, du courage des insurgés, mais aussi de cette liberté conquise qui, aujourd'hui encore, se chérit comme un trésor fragile. Comme le rappelle un vieil adage : "Celui qui ne sait pas d'où il vient ne peut savoir où il va. ”.
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