Pas encore de procès du chlordécone à Paris

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M.B. à Paris

La cour d’appel de Paris a renvoyé au 22 octobre prochain l’examen du recours des associations et des victimes contre le non-lieu dans l’affaire du chlordécone. Une décision sera prise pour la transmission, ou non, de deux Questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel. L’affaire sur le fond sera jugée encore plus tard, à la fin de cette année ou l’année prochaine.

« Choqué ! » C’est le mot que Serge Letchimy utilise pour se décrire, alors que le président de la CTM a « fait le déplacement tout spécialement de la Martinique » pour prendre la parole lors de ce qui était annoncé comme « le procès du chlordécone ».

Las, non seulement, le président n’a pu s’exprimer face aux juges – comme lui, de nombreuses parties civiles sont restées à la porte de cette audience à huis clos – mais le procès lui-même n’a pas eu lieu : il a été renvoyé au 22 octobre prochain.

Plusieurs points de procédure empêchaient l’examen par les juges de la Chambre de l’Instruction du recours des associations de victimes contre le non-lieu dans l’affaire du chlordécone rendu en janvier 2023.

D’abord, la bonne information des parties civiles : depuis l’annonce du non-lieu, plusieurs centaines de personnes se sont portées parties civiles au dossier, sollicitées notamment par des collectifs d’avocats. Leur prise en compte et leur bonne information nécessitaient de renvoyer le dossier selon plusieurs de leurs avocats présents à l’audience. Ils sont plus de 800 à s’être joints à la démarche depuis l’année dernière.

“Qu’est-ce qu’on attend ? Que les trois ministres mis en cause soient décédés ? “

Ensuite, les juges doivent statuer sur une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), un point de droit soulevé toujours par avocats des parties civiles.

« La question porte sur une jurisprudence constante de la Cour de cassation et exige que l’auteur de l’empoisonnement ait la volonté de tuer : il s’agissait de protéger les ministres lors de l’affaire du sang contaminé, resitue Me Leguevaques, auteur de plusieurs recours et défenseur de nombreuses parties civiles. Cette jurisprudence n’a jamais été remise en cause, elle est contraire à la loi et à la liberté des parties civiles. C’est essentiel parce qu’on nous dit, l’empoisonnement n’est pas possible parce qu’on n’a pas la preuve que M. Hayot a voulu tuer : en revanche, on reconnaît le fait qu’il a répandu une substance létale en connaissance de cause. Si la QPC est acceptée, les pollueurs vont enfin avoir des comptes à rendre à la société. »Le 22 octobre prochain, si les juges de la Chambre de l’Instruction choisissent de lui transmettre la QPC, le Conseil constitutionnel aura trois mois pour se prononcer sur la conformité de la loi actuelle.

« Il ne faut pas nous diviser face au Parquet, voilà pourquoi nous n’avons pas protesté officiellement, mais j’estime qu’il s’agit là de manœuvre dilatoires qui font perdre du temps à tout le monde », jugeait sévèrement Me Harry Durimel, avocat de plusieurs parties civiles de Guadeloupe et auteur de la première plainte, il y a 18 ans.

« Qu’on nous dise si l’ordonnance de non-lieu est confirmée ou pas ! De cette façon, si elle est infirmée, merveilleux, nous aurons un procès sur le fond et si elle est confirmée, nous pourrons nous battre devant la Cour de cassation et jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme ! Qu’est-ce qu’on attend ? Que les trois ministres mis en cause soient décédés ? »